Selon un nouveau rapport, la résistance au dolutégravir est en progression

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La dernière édition du rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur la résistance du VIH aux médicaments indique les pays dans lesquels la pharmacorésistance est en progression et propose des recommandations afin de permettre aux pays de déceler les éventuels problèmes et d’y réagir.

Le rapport contient de bonnes nouvelles et d’autres plus inquiétantes. Il souligne les niveaux élevés de suppression de la charge virale du VIH (> 90 %) chez les populations recevant un traitement antirétroviral (TAR) à base de dolutégravir (DTG). Cependant, les données d’observation et les données issues d’enquêtes nationales indiquent que les niveaux de résistance du VIH au DTG dépassent les niveaux observés dans les essais cliniques.

Depuis 2018, l’OMS recommande l’utilisation du dolutégravir comme traitement de première et de deuxième intention contre le VIH pour tous les groupes de population. Le DTG est un médicament plus efficace, plus facile à prendre et qui engendre moins d’effets secondaires que les autres médicaments actuellement utilisés. Il présente également une barrière génétique élevée au développement d’une pharmacorésistance.

Cependant, dans les quatre enquêtes mentionnées, les niveaux de résistance au dolutégravir allaient de 3,9 % à 8,6 %, et atteignaient 19,6 % chez les personnes ayant déjà reçu un traitement et qui sont passées à un traitement antirétroviral contenant du DTG alors qu’elles avaient une charge virale VIH élevée. À ce jour, seuls quelques pays ont communiqué des données d’enquête à l’OMS.

« Les preuves inquiétantes de résistance chez les personnes dont la charge virale n’est pas supprimée malgré un traitement au dolutégravir montrent qu’il faut redoubler de vigilance et intensifier les efforts pour optimiser la qualité des soins de l’infection à VIH, a déclaré la Dre Meg Doherty, Directrice du Département OMS Programmes mondiaux de lutte contre le VIH, l’hépatite et les infections sexuellement transmissibles. La surveillance standardisée est essentielle pour prévenir, suivre et maîtriser efficacement la résistance du VIH aux médicaments. »

Haïti est le seul pays à avoir fourni des données issues d’une enquête sur la pharmacorésistance du VIH chez les nourrissons n’ayant jamais reçu de traitement antirétroviral ou chez les nourrissons qui commencent un TAR pour la première fois. Un nourrisson, dont la mère avait reçu un traitement antirétroviral à base de DTG, présentait une résistance à ce dernier. Une prise en charge efficace des charges virales élevées chez les femmes enceintes et allaitantes est essentielle pour prévenir la transmission du VIH aux nourrissons. Il sera important de renforcer la surveillance systématique de la pharmacorésistance du VIH pour les nourrissons chez lesquels le VIH vient d’être diagnostiqué et qui ne suivent pas encore de traitement antirétroviral, afin d’orienter les options de TAR appropriées pour l’avenir.

La réalisation des cibles mondiales n’est pas sur la bonne voie
En 2022, plus de 75 % des 39 millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde recevaient un traitement contre le VIH. Les pays ont mis en œuvre les recommandations de l’OMS : 116 sur 127 ont adopté le traitement de première intention à base de DTG recommandé par l’OMS pour les adultes et les adolescents, et 74 % des pays à revenu faible ou intermédiaire ayant communiqué des données ont adopté le contrôle de la charge virale pour les adultes et les adolescents.

Mais les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de développement durable sont au point mort. En effet, on estime encore à 1,3 million le nombre de nouvelles infections à VIH et à 630 000 le nombre de décès dus à des causes liées à l’infection à VIH. Entre 2017 et 2022, pour la plupart des pays communiquant des données dans le cadre du système de Suivi mondial de la lutte contre le sida (GAM), les indicateurs de qualité programmatique pour le traitement du VIH n’ont pas atteint les cibles mondiales établies, ce qui souligne encore davantage la nécessité d’améliorer activement la qualité des services de traitement et de soins contre le VIH.

En 2022, seuls 12 des 45 pays ciblés par l’OMS ont déclaré avoir mené des enquêtes ou avoir intégré le suivi des indicateurs d’alerte rapide de la pharmacorésistance du VIH dans les systèmes de suivi et d’évaluation systématiques. De nombreux pays ne parviennent toujours pas à optimiser la continuité des soins, à supprimer la charge virale au niveau de la population et à faire passer les personnes en échec virologique à d’autres schémas thérapeutiques. De plus, il y a toujours des ruptures de stock de médicaments antirétroviraux, ce qui peut avoir un impact négatif sur l’observance thérapeutique des patients.

L’OMS recommande que les pays réalisent systématiquement une surveillance standardisée sur la pharmacorésistance du VIH afin de surveiller la prévalence et les schémas de résistance chez les personnes dont la charge virale n’a pas été supprimée. Il s’agit d’un point essentiel, car les informations et les données issues des enquêtes influencent l’élaboration des lignes directrices pour le traitement et conditionnent la qualité des programmes de traitement.

Recommandations pour une action nationale
Le rapport fait également état de cas de résistance aux inhibiteurs de l’intégrase du VIH (INSTI) après une exposition récente au cabotégravir à longue durée d’action (CAB-LA). Le retard dans la détection et la confirmation de l’infection à VIH peut renforcer le risque de développement d’une résistance aux INSTI. Depuis 2022, l’OMS recommande l’utilisation du CAB-LA injectable à longue durée d’action comme option supplémentaire de prévention du VIH pour les personnes exposées à un risque d’infection important.

Malgré le risque potentiel, l’OMS recommande le recours au CAB-LA pour la prophylaxie préexposition (PrEP) et demande que l’intensification de la PrEP s’accompagne d’une surveillance standardisée de la pharmacorésistance chez les personnes dont le test de dépistage du VIH est positif alors qu’elles sont traitées par une PrEP.

Le suivi régulier des indicateurs de la qualité des soins, tant au niveau des établissements de santé qu’au niveau national, ainsi que la correction de toute performance sous-optimale restent déterminants pour la réussite des programmes de traitement ARV. Les principaux indicateurs de la qualité des soins comprennent la prise du traitement antirétroviral à temps, la continuité du traitement antirétroviral, la couverture des tests de mesure de la charge virale, la réalisation en temps voulu de la deuxième mesure de la charge virale, les ruptures de stock de médicaments antirétroviraux et le passage rapide à un traitement antirétroviral de deuxième intention.

Le dernier rapport sur la pharmacorésistance du VIH insiste sur l’importance de renforcer les systèmes de notification des données de sorte que les pays puissent suivre efficacement les indicateurs de la qualité des soins et en rendre compte. Il souligne le rôle actif des établissements de soins et des programmes de traitement antirétroviral dans l’utilisation des données relatives aux indicateurs pour élaborer des solutions durables et adaptées au contexte local. Ces efforts sont essentiels pour optimiser la qualité de la prestation de services et réduire ainsi l’émergence d’un VIH résistant aux médicaments.

Réduire autant que possible la propagation de la pharmacorésistance du VIH est une part essentielle de la riposte élargie menée à l’échelle mondiale contre la résistance aux antimicrobiens qui exige une action coordonnée entre tous les secteurs gouvernementaux et tous les niveaux de la société.

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